Vie de Saint Benoît par Saint Grégoire, Pape.

Chapitre IV : De la conversion d'un moine instable.

  1. Dans l'un des monastères qu'il avait construits tout autour se trouvait un certain moine qui ne pouvait tenir en place au moment de la prière. Mais dès que les frères avaient fait l'inclination pour s'adonner à l'œuvre de l'oraison, aussitôt il sortait dehors et, avec un esprit de vagabondage, il s'occupait de choses terrestres et transitoires. Après avoir été bien souvent admonesté par son Abbé, on l'envoya à l'homme de Dieu qui, à son tour, lui adressa de vifs reproches pour son comportement inepte. De retour au monastère, c'est à peine s'il s'en tint pendant deux jours aux admonestations de l'homme de Dieu, car le 3ème jour, revenant à ses habitudes, il se mit à rôder partout pendant le temps de l'oraison.


  2. Comme la chose était rapportée au serviteur de Dieu par ce même homme qu'il avait établi Père du monastère, il dit : " Je viens, moi, et je le corrige par mes soins. " Comme il était arrivé au monastère et que, l'heure venue, la psalmodie finie, les frères s'adonnaient à l'oraison, il vit ce moine qui n'avait pu rester à la prière ; et voilà qu'un petit noiraud le tirait au-dehors par le bord de son vêtement ! Alors, tout bas, il dit au Père du monastère qui s'appelait Pompeïanus et au serviteur de Dieu Maur : " Est-ce que vous ne voyez pas celui qui tire ce moine-là dehors ? " " Non ", répondirent-ils. Il leur dit : " Prions pour que, vous aussi, vous voyiez celui que ce pauvre moine est en train de suivre. " Après deux jours de prières, le moine Maur le vit, mais Pompeïanus, le Père de ce monastère, n'y arrivait pas.


  3. Le lendemain, l'oraison achevée, l'homme de Dieu, sortant de l'oratoire, trouva le moine dehors : il le frappa avec une verge pour guérir la cécité de son cœur. Le moine à dater de ce jour n'eut plus jamais à souffrir des suggestions du démon qui l'entraînait. Mais il demeura immobile, appliqué à son devoir d'oraison et ainsi l'antique ennemi n'osa plus exercer sa domination sur son esprit : comme si c'était lui-même qui avait été atteint par le coup !

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