Une odyssée monastique incroyable.

La Valsainte se développa rapidement et fut à l'origine de plusieurs fondations, en Westphalie, en Angleterre, en Espagne, au Piémont, etc.
A partir de janvier 1798, la Suisse n'offrait plus un asile sûr pour les émigrés français. Mettant à profit la présence de la princesse de Condé parmi les moniales installées à Sembrancher en 1796 et qu'il avait prises sous son autorité, Dom Augustin décida de diriger tout son monde, moines, moniales, enfants, au total 254 personnes, vers la Russie. Plusieurs colonnes s'ébranlèrent vers l'Est, entre le 17 janvier et le 10 février 1798, par différents itinéraires, avec des points de ralliement.
Le périple fut épuisant, d'autant plus que Dom de Lestrange voulait qu'on suivît les plus fidèlement possible les Règlements monastiques, et les hommes ne mangeaient souvent qu'une fois par jour, à l'étape du soir, après le coucher du soleil : on compta une quarantaine de décès pendant toute la période de l'odyssée. Il y eut aussi quelques défections... Le terme du voyage fut atteint par l'avant-garde le 20 septembre : Orscha, sur le Dniepr. Le dernier groupe n'arriva qu'en juillet 1799.
Mais Dom Augustin avait déjà d'autres projets en vue, car il ne lui sembblait pas qu'en Russie il aurait les coudées libres. Il lorgnait sur l'Amérique, et réussit à se faire expulser par le Tsar en mars 1800.
Les moines, lassés, ne suivirent que modérément les vues de leur abbé. Seuls 36 passèrent en Amérique en 1803 ; ceux qui ne se fixèrent pas en Westphalie reprirent le chemin de Westmalle ou de la Valsainte.
Des tentatives de se réimplanter en France furent faites après le Concordat de 1801, mais Dom de Lestrange s'opposa de front à Napoléon à propos du serment exigé des Italiens en 1810. Un décret impérial du 28 juillet 1811 supprima tous les monastères trappistes de l'empire.
On chercha à arrêter dom Augustin. Après moult péripéties, il débarqua en Amérique en décembre 1813, et ne revint en France qu'un an plus tard.

Chronologie trappiste